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Depuis : Bagages pour le grand voyage

Posté par claus, 11 août 2019 · 298 visite(s)

 
- Alors, comment va M. Jouen ?
-Bien, bien Chloé, je viens justement de finir mes derniers bagages, mes préparatifs pour le grand voyage.
-Toujours la tête dans les nuages, M. Jouen, et de plus en plus délirant. Décidément, vous ne pouvez pas plutôt contempler le magnifique printemps que nous avons cette année et à quel point il est en avance.
-Justement, on dirait que la Nature fait ses préparatifs en même temps que je fais les miens. Et puis, j'ai besoin de vrais bourgeons qui vont éclore de la beauté de leur force, de fleurs authentiques figées d'harmonie toute une éternité, de fruits immortels que l'arbre pousse et achemine; que l'on mord en absorbant sans remord chair et jus au terrestre mais aussi bien au céleste réconfort. Bref une Nature en suspens entre deux promesses, qui aime de toute sa sève jusqu'à se répandre dans mon sang, comme si j'avais encore vingt ans.
- M. Jouen est toujours aussi surprenant, allez levez-vous, aidez-moi un peu, après on pourra parler de vos vingt ans.
-Mais vous vous obstinez à ne rien comprendre : j'ai vingt ans à nouveau aujourd'hui et je m'en vais vers le pays de mes nouvelles amours; celles qui n'en finiront plus de fleurir pour qu'un pauvre vieillard comme moi sente son cœur battre indéfiniment aux quatre coins de son âme aux vives flammes, capables de boire l'élixir d'amour, l'inextinguible amour, sans le carcan du squelette et le bon vouloir de ses organes. Et j'ai fait mes bagages, mes derniers préparatifs, que vous le vouliez ou non, pour l'immatériel, l'intangible qui croît à mesure que le corps s'use; qui me fait déjà un clin d'œil de l'azur vaporeux mais voluptueux du ciel. Aujourd'hui compte parmi les plus beaux jours de ma vie, je le sens et le pressens.
Je m'en vais, Chloé, laissez-moi vous faire mes adieux.
-Vous et vos bêtises, M. Jouen, un vrai charabia, vous serez encore là ce soir.
-Puisque l'on s'obstine à ne pas  me croire, je pars en claquant la porte derrière moi, et je me sens léger, léger comme le courant d'air de la fenêtre ouverte...
 



Source : Bagages pour le grand voyage



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